Fonds propres

Les exigences en matière de fonds propres définissent le volume minimal de fonds propres que les banques doivent détenir pour garantir une couverture appropriée des risques de pertes liés à leur activité. Elles visent également à éviter l’insolvabilité d’une banque même en cas de lourdes pertes. Depuis 2012, les banques dites d’importance systémique (systemically important banks [SIB]) doivent répondre à des exigences plus strictes que les autres établis-sements. Plusieurs fois remaniées, ces exigences concernent les deux types de fonds suivants :

  • les fonds going concern, qui sont destinés à atténuer les pertes résultant de l’activité courante ;

  • les fonds gone concern, qui sont des fonds supplémentaires destinés à absorber les pertes en cas de liquidation.

Les exigences en matière de fonds propres sont de deux sortes :

  • soit elles sont axées sur les risques et fixent un pourcentage de positions actives pon-dérées en fonction des risques (risk weighted assets [RWA]) ;

  • soit elles sont non pondérées et fixent un ratio d’endettement maximal (leverage ratio [LR]).

Description du problème de Credit Suisse

Même durant les mois où l’établissement a connu ses plus grosses difficultés, les indicateurs concernant les fonds propres du groupe Credit Suisse sont restés en permanence supérieurs aux exigences réglementaires. La faible dotation en fonds propres de la banque mère a toutefois contribué à réduire considérablement la marge de manœuvre durant la crise.

La banque mère est titulaire d’une autorisation bancaire délivrée par l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA). Elle exécute ses propres activités bancaires et détient toutes les participations importantes du groupe dans des filiales étrangères (en particulier aux États-Unis et au Royaume-Uni). Bien qu’elle doive aussi satisfaire aux exigences en matière de fonds propres, la banque mère bénéficie d’allégements notables. Elle est en particulier dispensée de l’obligation de couvrir la totalité des participations étrangères en fonds propres. Cet allégement a été fatal durant la crise : souhaitable et ayant un effet libératoire en période critique, la cession de participations étrangères a été impossible en réalité, car elle aurait considérablement affaibli la dotation en fonds propres de la banque mère. Ainsi, Credit Suisse disposait d’une marge de manœuvre très restreinte pour se réorienter stratégiquement, puis pour garantir sa stabilisation et son assainissement lors d’une phase ultérieure de la crise.

Proposition du Conseil fédéral

Dans son rapport du 10 avril 2024 sur la stabilité des banques, le Conseil fédéral propose les mesures suivantes pour remanier les exigences en matière de fonds propres :

  • renforcer la couverture en fonds propres des participations étrangères au sein d’un groupe financier, à la fois pour les SIB et les banques mères;

  • intégrer des composantes prospectives dans les suppléments de fonds propres du pi-lier 2 exigés des SIB (en particulier sur la base de tests de résistance ; il faudra exa-miner la forme qui se prête le mieux à la publication des résultats de ces tests) ;

  • durcir les exigences réglementaires relatives à l’évaluation prudente et au maintien de la valeur de certaines positions du bilan.

D’un point de vue formel, la modification proposée pour les banques mères concernera toutes les SIB de Suisse. Elle n’aura toutefois d’effet que sur les SIB actives au niveau international qui ont une structure complexe et des filiales de grande taille à l’étranger. Concrètement, elle s’appliquera donc à UBS. Le Conseil fédéral a décidé de ne pas proposer un relèvement gé-néral des fonds propres basé sur une augmentation du LR ou des composantes progressives du LR ou de la part RWA.

Effet des mesures sur les exigences en matière de fonds propres envers UBS

Les exigences en matière de fonds propres auxquelles UBS doit répondre à l’heure actuelle sont déjà élevées en comparaison internationale :

  • La composante progressive de ces exigences est très efficace. Si elle conserve sa taille actuelle, UBS devra satisfaire à des exigences dépassant d’environ 10 % celles auxquelles elle est soumise à l’heure actuelle. Reconnaissant les difficultés liées à la constitution des fonds propres exigés, la FINMA a dû, en 2023, accorder à UBS un délai transitoire courant jusqu’en 2030 pour augmenter progressivement ses fonds propres.

  • À l’expiration de ce délai transitoire, UBS détiendra des fonds going concern équivalents à ceux de ses homologues étrangères. En revanche, ses fonds destinés à absorber les pertes (TLAC) seront beaucoup plus élevés que ceux de ses homologues étrangères. Ainsi, la part RWA des TLAC s’établira à 27,6 % pour UBS (à partir de 2030), tandis qu’elle sera fixée à 24,2 % pour Deutsche Bank et à 21,5 % pour Morgan Stanley.

  • En Suisse, les exigences liées à l’endettement maximal (leverage ratio [LR]) sont déjà supérieures à celles qui s’appliquent aux banques étrangères comparables. Ainsi, UBS devra présenter un LR correspondant à 9,6 % des TLAC (à partir de 2030), tandis que ce ratio sera de 7 % pour Deutsche Bank et de 9,5 % pour Morgan Stanley.

  • La Suisse prévoit de reprendre les normes finales de Bâle III et de les mettre en vigueur sur son territoire le 1er janvier 2025. De ce fait, les exigences en matière de fonds propres seront de nouveau remaniées en profondeur et davantage axées sur les risques. En outre, la suppression des allégements octroyés à Credit Suisse (« filtres réglementaires ») fera augmenter les exigences et, par conséquent, le volume de fonds propres qu’UBS doit atteindre.

Les mesures proposées entraîneront un net relèvement des exigences en matière de fonds propres auxquelles UBS doit satisfaire :

  • Lorsqu’elle déterminera les suppléments de fonds propres requis pour chaque établissement (supplément du pilier 2), la FINMA tiendra également compte de critères prospectifs ainsi que des résultats des tests de résistance et de la surveillance courante. Le montant des suppléments imposés à UBS sera fixé par la FINMA.

  • Les exigences en matière de fonds propres que la banque mère d’UBS doit remplir seront renforcées de manière ciblée. Pour s’y conformer, UBS devra couvrir ses participations étrangères avec davantage de fonds propres. L’augmentation de cette couverture fera croître la dotation en capital de la banque mère, diminuera les incitations à créer des structures sociales complexes et améliorera les chances de succès d’un assainissement.
    Selon les exigences actuelles, la banque mère est tenue de détenir suffisamment de fonds propres pour couvrir environ 60 % de ses participations dans une filiale étrangère. En tenant compte des autres mesures, le Conseil fédéral entend atteindre une couverture en fonds propres nettement plus élevée qu’à l’heure actuelle. À elle seule, la mesure qu’il propose à cet effet imposera à UBS d’accroître ses fonds propres de manière substantielle.

  • Les prescriptions réglementaires seront renforcées pour ce qui concerne l’évaluation prudente et le maintien de la valeur de certaines positions du bilan, comme les actifs qui peuvent rapidement perdre de leur valeur lors de crises (par ex. logiciel propre à une entreprise, prétentions fiscales ou emprunts ayant une longue durée résiduelle). Le volume de fonds propres supplémentaires que ces nouvelles exigences imposeront à UBS doit encore être examiné en détail.

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Dernière modification 10.04.2024

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