CF Karin Keller-Sutter: «Il ne faut pas confondre les pompiers et les pyromanes»

Tagesanzeiger (Markus Häfliger, Konrad Staehelin, Delphine Gasche): Finanzministerin Karin Keller-Sutter sagt, wie viel Geld der Bund mit der CS-Rettung verdient hat. Und sie kündigt eine erste Gesetzesänderung an, um ein neues Grossbanken-Desaster zu verhindern.

Comment avez-vous vécu les jours précédant la chute de Crédit Suisse?

Dès le jeudi (ndlr: 16 mars), il était clair que la banque ferait faillite le lundi. À partir de là, je n’ai plus eu aucune notion du temps. Étions-nous vendredi, samedi ou dimanche? Quelle heure était-il? Il y avait une telle effervescence et une telle pression pour trouver une solution, et ainsi éviter des dégâts énormes pour la Suisse et la population.

Ça m’a rappelé les débuts de la pandémie de coronavirus. Malgré tout, j’ai réussi à rester calme et concentrée. Et, avec l’ensemble du Conseil fédéral, nous avons démontré que nous pouvions réagir rapidement. Ça a été reconnu à l’international.

Votre travail est certes salué à l’étranger. Mais en Suisse, les critiques sont légion. Le parlement a rejeté les crédits pour les prêts. Il devrait instaurer une commission d’enquête parlementaire (CEP). Est-ce un désaveu de votre politique?

Absolument pas. Pourquoi devrais-je le prendre ainsi? Le parlement se doit de retracer les antécédents, les circonstances et les décisions exactes qui ont mené à de tels événements. Et puis, je n’étais en fonction au Département des finances que depuis quelques semaines.

Votre prédécesseur, Ueli Maurer, n’aurait-il pas bien fait son travail?

La CEP devra répondre à cette question. La responsabilité première repose toutefois sur les épaules du conseil d’administration et de la direction de CS. Le Conseil fédéral, y compris mon prédécesseur, n’était pas responsable de la banque. Il ne faut pas confondre les pompiers et les pyromanes.

Sur quoi devrait enquêter la CEP, selon vous?

Le parlement devra le décider. Personnellement, je pense que le mandat devrait être aussi large que possible pour que la CEP puisse avoir un impact. Les leçons des événements passés doivent être tirées.

Faut-il revoir la législation sur les banques?

C’est encore trop tôt. Nous venons, entre autres, de mettre sur pied un groupe d’experts pour examiner des pistes évoquées ici et là, comme une limitation des rémunérations variables, une séparation des activités bancaires ou encore une augmentation des fonds propres.

Il faut attendre les conclusions de l’analyse. Quand on va chez le médecin, on ne reçoit pas quinze médicaments d’un coup, en espérant que l’un d’entre eux fonctionnera. Un diagnostic est d’abord posé. Nous devons aussi effectuer une analyse précise avant d’agir. Il ne faut pas oublier que la chute de CS résulte avant tout d’une perte massive de confiance. Et on ne peut pas légiférer sur la confiance.

À vous entendre, on a l’impression qu’il n’y a rien à changer...

Non, c’est faux. Je pense que des ajustements seront nécessaires dans certains domaines. De mon point de vue, la surveillance devrait par exemple être renforcée.

La fusion de CS et UBS inquiète. Ne faut-il pas prendre des mesures plus fortes pour éviter que ce nouveau monstre bancaire tombe à son tour?

Nous devons tout faire pour éviter que cela n’advienne. J’aimerais toutefois noter que la législation sur les «too big to fail» a déjà conduit à une réduction des risques. Le bilan d’UBS de 2007 était deux fois plus élevé par rapport au produit intérieur brut suisse que les bilans actuels de CS et UBS réunis.

Combien d’argent ont déjà retiré Crédit Suisse et UBS?

Je ne peux pas vous donner le montant exact. Mais je peux vous dire que presque 170 milliards de francs ont été demandés par CS ce fameux dimanche 19 mars. Mais la banque a déjà commencé à les rembourser. Le public liquidity backstop (PLB) - soit le prêt pour lequel la Confédération reçoit des intérêts - devrait être remboursé bientôt. À l’heure actuelle, le montant dû s’élève encore à 5 milliards.

La Confédération fait donc de nouveau des bénéfices en sauvant une banque...

Pour le moment, nous enregistrons effectivement des recettes. Au total, elles s’élèvent à quelque 100 millions de francs. À cela s’ajoutent, bien entendu, les recettes de la Banque nationale suisse.

Faire des bénéfices là où les petits actionnaires perdent leur bas de laine, est-ce juste?

Des plaintes ont été déposées sur ce sujet. Je ne peux dès lors pas me prononcer sur des procédures judiciaires. Le Tribunal administratif fédéral devra trancher.

Devoir introduire un nouvel impôt pour les entreprises, ça embête la libérale que vous êtes?

Je le vois de manière pragmatique. Cent quarante pays se sont engagés pour introduire cet impôt minimum. Que la Suisse le veuille ou non, il entrera en vigueur. La seule question qu’il faut se poser, c’est: «Voulons-nous prélever nous-mêmes cet impôt minimum ou prenons-nous le risque de voir filer des recettes à l’étranger?» Pour moi, il est clair que les revenus doivent rester en Suisse.

Que compte faire Berne si un pays n’exige pas 15% d’impôt? Réclamera-t-elle son «dû» ou jouera-t-elle la carte de la diplomatie?

La Suisse réclamerait la différence pour atteindre les 15% d’impôt. Toutefois, certaines questions sont encore ouvertes.

L’impôt en lui-même n’est pas disputé. La pierre d’achoppement, c’est la répartition des recettes. Est-ce correct d’accorder seulement 25% à la Confédération, dont les comptes sont dans le rouge, alors que ceux des cantons sont au beau fixe?

C’est un compromis trouvé entre la Confédération, les cantons et les communes. Et le parlement l’a approuvé. Par ailleurs, on s’attend à des recettes oscillant entre 1 et 2,5 milliards, dont un quart pour la Confédération. Ce n’est pas avec ça qu’on sauvera les finances fédérales. Les impôts sur les bénéfices reviennent aux cantons. Il est évident que ces derniers reçoivent le produit principal de l’impôt complémentaire.

La réforme est également critiquée pour enrichir encore plus les cantons riches. Que répondez-vous?

Les cantons, qui ont maintenant un impôt plus bas et qui abritent des grands groupes, auront bien sûr des recettes plus élevées en compensation. Mais, grâce à la péréquation financière, il y aura une compensation efficace entre les cantons. Pour moi, ce n’est pas une raison pour rejeter la réforme. Si l’on veut créer une sécurité juridique pour les entreprises et éviter que l’argent des contribuables ne parte à l’étranger, on peut dire oui en toute confiance. La répartition des recettes pourrait être rediscutée au parlement après la votation, car l’ordonnance doit être transformée en loi après six ans au plus tard.

Est-ce que vous avez un plan B en cas de refus du peuple?

Non. Il serait malhonnête de vouloir faire croire aux gens qu’un nouveau projet pourrait être adopté à temps à coup sûr. Quand le peuple dit non, il faut analyser les motifs de ce refus avant d’élaborer une nouvelle mouture. Tout le processus politique est à refaire. Le parlement doit s’exprimer. Et une nouvelle votation populaire doit être organisée.

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Letzte Änderung 26.05.2023

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