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Interviews, Videos & GastartikelVeröffentlicht am 13. September 2025

Karin Keller-Sutter: «ma préoccupation principale est de sauvegarder les intérêts de notre pays»

Le Temps (Annick Chevillot) - La présidente de la Confédération s’engage pour la suppression de l’impôt sur la valeur locative. Objet soumis à votation le 28 septembre. Elle évoque également Donald Trump, son parti et les événements marquants de son année présidentielle.

Karin Keller-Sutter a entamé son année présidentielle à Auschwitz, «une visite d’une intensité incroyable», avant d’être emportée par le tourbillon de l’actualité: entre le décès du pape, la catastrophe de Blatten et les échanges avec le président américain Donald Trump. Malgré un emploi du temps chahuté, elle s’engage pour la suppression de l’impôt sur la valeur locative.

Le Temps: La crise de Credit Suisse, au printemps 2023, était considérée comme votre période la plus difficile au Conseil fédéral. Depuis plusieurs mois, vous luttez contre les droits de douane punitifs imposés par Donald Trump. Dans ce contexte, Madame la Présidente de la Confédération, comment allez-vous?

Karin Keller-Sutter: Je vous remercie, je vais très bien. Mais ma préoccupation principale est de sauvegarder les intérêts de notre pays. Le Conseil fédéral s’engage en vue de trouver une solution.

Votre conversation téléphonique avec Donald Trump, fin juillet, a fait couler beaucoup d’encre. Que pouvez-vous dire à ce sujet?

Oui, beaucoup de choses ont été écrites. Certaines étaient vraies, d’autres fausses. Je n’ai rien à ajouter à propos de cet échange.

Le 5 septembre, Guy Parmelin s’est rendu à Washington pour une nouvelle série de négociations avec le gouvernement américain. Où en est-on?

Le Conseil fédéral a adopté une nouvelle offre à l’intention des Etats-Unis. Celle-ci a été remise à l’USTR, le Bureau du représentant américain au commerce. Le Département fédéral compétent, celui de l’économie de Guy Parmelin, est à la manœuvre avec le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco). Nous attendons de voir quels résultats seront obtenus.

Pouvez-vous en dire plus? Ne serait-ce que sur le délai de réponse?

Non, je ne peux rien dire à ce sujet. Mon collègue Ignazio Cassis dit toujours que la qualité prime sur la rapidité. Je pense que c’est valable dans ce cas aussi. En fin de compte, c’est le président américain qui décide, lui seul.

Votre prochaine échéance est la votation du 28 septembre sur la suppression de l’impôt sur la valeur locative. Un projet soutenu par le Conseil fédéral. Est-ce une cause qui vous tient particulièrement à cœur?

(Sourire) Les affaires du parlement tiennent toujours particulièrement à cœur au Conseil fédéral. Dans le cas présent, il s’agit d’un thème qui a occupé le parlement à de nombreuses reprises. Jusqu’ici, les tentatives de supprimer l’imposition de la valeur locative ont toutes échoué car les projets n’étaient pas équilibrés. Cette fois, la recherche d’un compromis a duré sept ans et a nécessité d’âpres négociations entre le Conseil national et le Conseil des Etats. Le Conseil fédéral estime que le projet soumis à la population est équilibré. Nous soutenons ce projet aussi parce qu’il permet un changement complet et cohérent du système fiscal. S’il est important de supprimer cet impôt, il faut dans le même temps limiter les déductions sur les dettes hypothécaires et les frais d’entretien. On ne peut pas gagner sur tous les plans.

Le niveau d’endettement élevé en Suisse est un sujet récurrent. Qu’en est-il pour vous: avez-vous remboursé votre hypothèque?

Non, pas entièrement. Mais je comprends bien cette préoccupation de la population. Il est important de pouvoir réduire la dette hypothécaire, en particulier lorsqu’on vieillit. Et c’est précisément ce qui inquiète beaucoup de personnes âgées: elles sont propriétaires de leur logement, mais elles disposent d’un faible revenu à la retraite. Devoir payer des impôts sur la valeur locative, qui est perçue comme un revenu fictif, peut représenter pour elles une charge élevée.

Nous avons l’un des taux d’endettement privé les plus élevés d’Europe. Est-ce vraiment aussi grave qu’on le prétend actuellement?

Il est certain que la réduction de la dette favorise la stabilité et la prévention des crises. Et aujourd’hui, le système comporte un effet pervers. Plus l’endettement est élevé, plus les déductions fiscales sont avantageuses. Ce système hypothécaire suisse est, en fait, assez exotique. L’impôt sur la valeur locative n’a pas été introduit pour des questions d’équité fiscale, mais pour des raisons budgétaires il y a environ 100 ans. L’Etat avait besoin d’argent et a donc décidé de le prélever en guise de contribution de crise. Aujourd’hui, de nombreux propriétaires le considèrent, à juste titre, comme injuste.

Cette votation génère également un Röstigraben. Avec des Romands plutôt contre et des Alémaniques plutôt pour le compromis proposé. Observez-vous également cette différence?

En tout cas, cela s’est vu déjà lors des débats au parlement, avec des élus romands beaucoup plus sceptiques sur le sujet. Reste à savoir si cela apparaîtra également lors du vote populaire.

Vous l’avez dit, cette mesure a été introduite pour des raisons budgétaires. Entre-temps, elle est aussi devenue en quelque sorte un objet d’équité entre locataires et propriétaires. Mais les locataires ont de plus en plus de difficultés à trouver un logement vacant. Dans ce contexte, est-il légitime d’accorder un cadeau fiscal aux propriétaires?

Il n’y aura d’allègement fiscal que si les taux hypothécaires sont bas. En cas de hausse, l’inverse se produira. Je pense qu’il ne faut pas monter les locataires et les propriétaires les uns contre les autres. Car au cours d’une vie, on peut appartenir aux deux catégories. Vous êtes peut-être locataire, vous achetez une maison et, à la retraite, vous la revendez parce que vous préférez vivre dans un appartement. Devenir propriétaire est une aspiration légitime, qui doit rester possible.

La plupart de ceux qui peuvent encore acheter un logement aujourd’hui sont en principe très fortunés…

Que signifie «très fortunés»? C’est vrai que devenir propriétaire à Genève est plus compliqué que dans le Jura. Mais je suis convaincue qu’il existe de nombreuses régions dans le pays où la propriété est accessible à la classe moyenne et aux familles. J’irais même plus loin: il est nécessaire que la propriété soit accessible au plus grand nombre possible. L’expérience montre que lorsque l’on possède son logement, on assume également la responsabilité de ce bien.

Mais cela ne va-t-il pas devenir plus difficile si les déductions sur les dettes hypothécaires sont supprimées? Le nouveau système rendra l’accès à la propriété plus difficile, non?

Le futur système fiscal n’a pas d’influence sur les prix de l’immobilier résidentiel. C’est le niveau des taux hypothécaires qui influence cette variable. Et le projet prévoit une déduction pour les primo-accédants. Un privilège qui bénéficiera aux jeunes familles, et pas aux investisseurs.

Cette déduction fiscale vise à compenser le fait que les propriétaires les plus âgés, qui n’ont déjà plus beaucoup de dettes hypothécaires, bénéficieront du nouveau système. Est-ce une compensation équitable pour les primo-accédants?

Il s’agit d’une décision politique du parlement. Il souhaitait encourager l’accession à la propriété et ne voulait pas que les jeunes acquéreurs soient désavantagés puisqu’ils ne pourraient plus bénéficier des déductions hypothécaires.

En Suisse romande, ce paquet que vous qualifiez d’équilibré est aussi critiqué parce que la suppression de l’impôt sur la valeur locative signifie également la suppression des déductions fiscales pour les rénovations, notamment énergétiques…

Les propriétaires ne pourront plus déduire des frais d’entretien pour les logements qu’ils habitent, c’est vrai. On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Par contre, les propriétaires qui louent des appartements à des tiers pourront continuer d’effectuer ces déductions. Comme aujourd’hui, les cantons pourront en outre continuer à autoriser les déductions pour des mesures d’économie d’énergie et de protection de l’environnement jusqu’en 2050.

Vous l’avez rappelé, l’impôt sur la valeur locative a été introduit comme taxe militaire. Pourquoi ne pas le conserver, alors que la Suisse se réarme et augmente le budget militaire?

Oui, mais cet impôt introduit par temps de guerre est depuis longtemps devenu un impôt dont le produit est versé dans la caisse générale de la Confédération. Il n’est pas affecté à un usage particulier.

Dans l’état actuel des choses, la Confédération, les cantons et les communes perdraient 1,8 milliard si l’impôt sur la valeur locative était supprimé. Est-ce compatible avec le plan d’allègement budgétaire de la Confédération?

La suppression de la valeur locative entraînera des pertes des recettes si les taux hypothécaires sont bas et des recettes lorsque les taux sont hauts. Les chiffres que vous citez sont justes si les taux atteignent 1,5%, mais avec 3%, il y aura des rentrées supplémentaires. Je me souviens par exemple que lorsque mon mari et moi avons acheté notre maison, les taux s’élevaient à 4,5%. Les taux changent. Pour ce qui est du programme d’allègement, le fait est que nous ne pourrons plus respecter le frein à l’endettement au cours des prochaines années si nous ne le mettons pas en œuvre, et nous aurons un déficit de 2 à 3 milliards. Une alternative serait d’augmenter les impôts. Ce serait un très mauvais signal envoyé à la population. Parce qu’au niveau de la Confédération, nous n’avons pas un problème de recettes – elles continuent d’augmenter fortement –, nous avons un problème de dépenses. L’autre option consisterait à réaliser des économies dans les domaines qui ne nécessitent pas de modifications législatives. Par exemple, dans l’agriculture, l’éducation, la recherche, la coopération au développement ou l’armée. Mais cette solution n’est pas juste: on ne peut pas couper seulement dans les dépenses non liées [à une loi, ndlr], nous devons aussi nous pencher sur les multiples subventions fédérales.

Pensez-vous que votre projet, qui affronte des vents contraires assez puissants au parlement, sera accepté?

Le parlement est libre de le rejeter. Mais j’aimerais que l’on comprenne le point suivant: il ne s’agit pas d’économies. Le paquet d’allègement vise uniquement à freiner la croissance des dépenses. Sans cette solution, les dépenses fédérales augmenteront de 17% d’ici à 2029 et de 14% avec le paquet d’allègement.

Entre les pertes liées à la suppression de l’impôt sur la valeur locative et le paquet d’allègement que vous proposez, certains cantons parlent déjà d’une éventuelle augmentation des impôts…

Le projet en votation le 28 septembre autorise les cantons à introduire un impôt spécial sur les résidences secondaires, s’ils le souhaitent. Mais ils sont libres de décider. La situation financière est très différente entre les cantons et la Confédération. Au Conseil fédéral, nous voulons éviter des hausses d’impôts parce que nous avons déjà augmenté la TVA au 1er janvier 2024. Et nous avons alors aussi introduit l’impôt minimum de l’OCDE. Nous avons calculé qu’avec tous les impôts fédéraux et taxes fédérales, nous aurons déjà 5 milliards de recettes supplémentaires d’ici à 2027.

L’impôt minimal de l’OCDE vise à taxer le bénéfice des grandes entreprises à hauteur de 15%. Votre propre parti, le PLR, estime qu’il faudrait le suspendre en raison des taxes douanières américaines de 39%, pour renforcer l’attractivité de la place économique suisse. Qu’en pensez-vous?

Si nous suspendons cet impôt – accepté par 80% de la population en 2023 – que se passera-t-il? Il restera en vigueur dans les pays membres de l’Union européenne et certains du G7, à l’exception notable des Etats-Unis. Les entreprises générant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions de francs devront payer cet impôt, mais à l’étranger et plus en Suisse. Nous nous tirerions une balle dans le pied en suspendant cette taxe. Cela représenterait des entrées fiscales en moins, mais ne soulagerait pas nos grandes entreprises.

Votre parti va élire une nouvelle présidence le 18 octobre. Que pensez-vous de la proposition d’une coprésidence? Ce serait une nouveauté pour le PLR.

C’est au parti de décider ce qui est bon pour lui. Personnellement, je ne serai pas présente ce jour-là: je serai à Washington pour la réunion annuelle du Comité de Bretton Woods [elle se tient en fait le 14 octobre 2025, ndlr]. Cela dit, je suis reconnaissante à Susanne Vincenz-Stauffacher et à Benjamin Mühlemann de s’engager pour assumer cette tâche.

Vous parlez de gratitude, alors que la présidence du PLR constitue un des meilleurs postes de la politique suisse, non?

Oui, bien sûr, mais cela reste une fonction exigeante. Surtout dans une démocratie directe. Cela vaut d’ailleurs pour les présidences de tous les partis.

Le 18 octobre, les délégués du parti vont également prendre position sur les accords avec l’Union européenne. Allez-vous défendre ce paquet d’accords ou laisser cette tâche à votre collègue Ignazio Cassis?

Le Conseil fédéral estime que ce paquet est important et qu’il stabilise les relations avec l’Union européenne. Il est important pour l’accès au marché commun. Cet accord présente évidemment des avantages et des inconvénients, notamment une certaine perte de souveraineté. Mais il s’agit en fin de compte d’une mise en balance des intérêts et la population pourra s’exprimer sur le sujet.

Les trois événements marquants de sa présidence

L’année présidentielle de Karin Keller-Sutter est parsemée d’embûches. Les urgences se succèdent à un rythme soutenu. La Saint-Galloise a été particulièrement touchée par trois événements.

Besuch von Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter in Auschwitz-Birkenau
«L’expérience qui m’a le plus touché n’est pas vraiment joyeuse, mais elle a été d’une intensité incroyable. Le 25 janvier, je suis allée à Auschwitz pour les 80 ans de la libération de ce camp d’extermination. J’étais sur place pour la première fois avec des survivants suisses. Et je dois vous dire que cette visite m’a beaucoup préoccupée avant même de m’y rendre. Il était important d’y être avec ces anciens déportés. Ce massacre industriel, cette ampleur, ce camp… C’est… tellement indescriptible. Dix jours plus tard, j’ai encore organisé un déjeuner pour les survivants suisses de l’Holocauste. Un moment très émouvant.»
Papst Leo XIV. begrüsst die Gläubigen bei seiner Ankunft im Papamobil auf dem Petersplatz.
«Je me souviens aussi d’un événement plus joyeux, je pense à l’intronisation du nouveau pape à Rome au mois de mai.»
Die Schweizer Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter sieht aus einem Hubschrauber die Schäden, die der verheerende Erdrutsch im Dorf Blatten angerichtet hat.
«En Suisse, c’est Blatten qui m’a marquée! Ce n’est pas très positif non plus, mais très émouvant. Deux jours après l’effondrement du glacier, j’ai survolé la zone dévastée en hélicoptère. Je n’avais jamais vu une catastrophe d’une telle ampleur en Suisse. La couche de gravats qui recouvre le village m’a fait penser à un sarcophage. Cette catastrophe et la réaction de la population avec qui j’ai pu parler m’ont vraiment beaucoup touchée.»

Bundesrätin Karin Keller-Sutter

Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter während der ersten offiziellen Bundesratssitzung des Jahres 2025

Präsidialjahr 2025

Karin Keller-Sutter amtet im Jahr 2025 als Bundespräsidentin.

Bundesrätin Karin Keller-Sutter zu Beginn der Debatte im Nationalrat

Biografie

Bundesrätin Karin Keller-Sutter ist seit Januar 2023 Vorsteherin des Eidgenössischen Finanzdepartments EFD und ist seit 2019 im Bundesrat. Zuvor war sie Ständerätin des Kanton St. Gallen.

Autogrammkarte

Hier können Sie eine Autogrammkarte der Bundespräsidentin bestellen.

Bundesrätin Karin Keller-Sutter diskutiert während einer Podiumsdiskussion mit Journalist Sebastian Ramspeck,

Interviews und Beiträge

Eine Auswahl an Interviews von Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter.

Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter spricht an der Fruehjahrssession der Eidgenössischen Räte

Reden

Reden von Bundespräsidentin Karin Keller-Sutter im Wortlaut.